LA TANNERIE

On s'interroge sur l'origine de ce bâtiment imposant, situé en front de lac sous l'enceinte du château, appelé "La Tannerie". Fondée par la famille Duchesne, originaire de Franche-Comté, une tannerie a fonctionné à Nernier durant 159 ans, apportant au village une dimension économique avec des emplois et des revenus pendant plus d'un siècle et demi.
Elle fermera ses portes en 1949 et, l'ensemble sera acheté et rénové entièrement par un architecte suisse. Depuis les années 60, les bâtiments de la Tannerie sont à usage résidentiel, composés d'appartements et de maisons "pieds dans l'eau".
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Pour tanner les peaux, on utilisait l’écorce de chêne. Les exploitants forestiers détachaient les plaques d’écorce en avril, à la sève montante et, les laissaient sécher en fagots jusqu’en juin.
Quand arrivait le temps des livraisons de bois à la tannerie, en juin, une animation insolite parcourait les rues étroites et encombrées du village.. Tirés par de solides chevaux de trait, les grands chars chargés d’écorces odorantes se frayaient un passage, parfois au centimètre près. Le déchargement se faisait à dos d’homme. Patrons et ouvriers vérifiaient ensemble le séchage et la qualité des écorces, qu’ils pesaient sur d’énormes balances à poids et calculaient les sommes à verser aux exploitants. Peu à peu, le plancher des hangars destinés au stockage pliait sous le poids des écorces (de 50 à 150 tonnes).
Les peaux, nécessaires au travail de tannerie, étaient achetées aux grandes foires de Lyon et de Paris.
A leur arrivée, ces peaux (dîtes vertes), après avoir été plongées dans l’eau claire, étaient débarrassées de leur poil dans un grand tonneau à palettes empli d’une solution chimique. Ensuite, tendues une à une sur des chevalets de bois, elles étaient décapées à l’aide d’un grand couteau par les ouvriers, protégés d’un tablier de cuir enveloppant. A ce stade de la préparation, l’odeur était nauséabonde et se répandait alentour...
On jetait généreusement dans le lac toutes les graisses et tous les déchets récupérés... Un dernier rinçage après le passage au fouloir et c’était l’entassement des peaux et des écorces par couches successives dans des fosses. Il existait à Nernier une vingtaine de fosses de deux mètres de large sur trois mètres de profondeur, dont les parois étaient lambrissées de bois et cerclées. Elles étaient creusées, notamment, le long du mur d’enceinte de château, place Maître Jacques et dans l’enceinte de la tannerie. Certaines existent toujours, recouvertes de terre dans les actuels jardins de La Tannerie.
Les peaux macéraient dans les fosses pendant six mois avant qu’en 1919, un nouveau procédé (à base d’extrait de mimosa) permît de réduire à un mois le temps de macération. Quand on retirait les peaux et les écorces des fosses, le cuir, après séchage, était prêt à être employé. Les écorces servaient ensuite au chauffage domestique.
Les ouvriers tanneurs (au nombre de huit environ), recrutés dans le village, étaient en même temps cultivateurs, éleveurs ou pêcheurs. Les conditions de travail, adoucies en 1924 par la relative motorisation de l’usine, étaient rudes, avec des journées longues, 11 heures en 1924.
Le souvenir de l’ancienne tannerie, aujourd’hui, demeure à travers le nom conservé de l’ensemble immobilier résidentiel qui lui a succédé, La Tannerie.
